J'ai entendu dire que les diables étaient autrefois des anges. Parce qu'ils avaient des attentes irréalistes, ils ont été jetés en enfer et sont devenus des démons.
« - Bélial, mon très cher ami. Ne t'avais-je pas prévenu de ce qui allait advenir de toi si tu tombais encore amoureux d'une fille qui ne mérite pas que tu t'y attaches ? Tu mérites qu'on t'aime, tu mérites une femme forte, qui saura te rendre fou ne serait-ce qu'en te regardant dans les yeux. Une femme avec un caractère, et qui te sera acquise pour toujours. Tu n'as pas besoin d'une fillette. Tu as besoin d'une femme. Une vraie, qui a pour but de te faire oublier. Te faire oublier à quel point tu as mal aujourd'hui. Te faire oublier que tu es sans cœur. Sans remord. Ou alors tu n'as besoin de rien. C'est à toi de voir comment tu souhaites que ta vie se déroule. Soit tu trouves une vraie femme, soit tu en trouves des milliers qui partageront ton lit tous les soirs.
Le Diable sourit à son ami, assit en face de lui dans la pièce la plus reculée de l'Inferno. Le démon quant à lui, soupire, un verre à la main, qu'il apporte de temps à autres à ses lèvres fines et pâles, son regard gris métallique dépourvu de pupilles plongé dans le liquide ambré qui règne dans le cristal du récipient. Puis il repose toute son attention sur son ami le plus fidèle. Le regarde pendant trente secondes au moins. Puis il soupire de nouveau, faisant un geste las de la main. Une jeune femme se dirige vers eux et leur offre une danse sensuelle, le regard empli d'envie et de désir pour ces deux grands hommes que tout le monde connait. Bélial la regarde, imperturbable, d'un calme olympien.
- Tu sais, je crois que tu avais raison sur elle. Elle ne me mérite pas. Elle ne mérite pas le fait que je m'intéresse à elle. Je crois que je vais arrêter de me lamenter sur mon sort. C'est inutile. Je suis Bélial, pas un vulgaire homme qu'elle aurait pu mettre dans son lit. D'ailleurs, heureusement qu'il ne s'est rien passé, j'aurai regretté.
Le démon sourit alors que son bras droit arrive jusqu'à lui avec une petite boîte dans les mains qu'il lui tend avant de partir, en sens inverse, craignant le regard du Diable à son égard. Bélial ouvre le dit présent en fronçant les sourcils. Voyant le contenu, il soupire et pose la boîte sur la table devant lui. Lucifer en regarde également le contenu puis se met à rire à plein poumons, d'un rire rauque et puissant, comme venu des entrailles des Enfers.
- Elle m'étonne cette petite. Crois-tu qu'elle essaie de te récupérer ?
Le démon soupire, encore, puis hausse les épaules. D'un geste de la main, il fait apparaître des flammes qui font brûler le contenu de la pauvre boîte qui n'a rien demandé. Puis il regarde son ami, un sourire satisfait sur le visage. Lucifer, levant son verre, sourit à son tour et s'exclame.
- A ton retour, mon ami. Tu m'as manqué. »
Il a revêtu ses plus beaux atours pour être en parfaite harmonie avec le lieu qu'il a érigé en son image. L'Inferno. Un style baroque, aux couleurs sombres et ténébreuses, comme lui. Un style un peu effrayant, comme lui. Ce soir, il porte un pantalon de cuir noir, et une chemise à jabots blanche ouverte sur le haut, laissant entrevoir son torse de neige sans impureté. Ses cheveux de jais sont lâchés sur son crâne, coiffés en arrière, comme à son habitude, venant caresser parfois la peau diaphane de son visage. Ses yeux sont d'un gris métallique inquiétant, profond pourtant, tels deux cailloux brillants que l'on aimerait dérober à leur possesseur. Son visage est fin, sans imperfection, une petite barbe naissante, pareil à du marbre dans lequel on aurait sculpté le plus beau des regards. Cet homme. Surement le plus parfait, à ses yeux du moins, à ceux des autres on ne sait pas, il faudrait leur demander. Mais oseraient-ils parler en sa présence ? Ca il faudrait aussi leur demander.
La tristesse est momentanée ; la douleur est toujours éternelle.
« Aimerais-tu simplement penser à nous un peu. Imaginer nos corps tendrement enlacés. Le souffle de ma bouche sur tes lèvres enfiévrées. L'incendie d'un regard allumant mille feux. Aimerais-tu le velours de ma main caressante, descendant lentement sur ton corps dénudé. Quand du bout de mes doigts sur ta peau désirée, je dessine tes courbes jusqu'au bas de ton ventre. Aimerais-tu ressentir le moindre frémissement inonder tout ton corps en vagues déferlantes. Et puis t'abandonner émue et ruisselante aux larmes inattendues de mes gestes gourmands. Aimerais-tu voir mon âme renaître sous tes cieux, lorsque sous tes baisers tu sens mon corps se tendre. S'approcher au plus près et puis enfin se prendre, et les larmes aux yeux se perdre tous les deux. Aimerais-tu cet instant où l'univers bascule, accrochés l'un à l'autre comme deux naufragés. Plonger, plonger encore ensemble, se baigner dans la vague du lit océan. Et au bout de la nuit atteindre enfin les nues, pour exploser soudain en milliards d'étoiles, avec le sentiment, en déchirant un voile, de toucher avec toi un instant absolu.
La ville s'endormait. Mon Inferno s'éveillait. J'ai vu entrer une femme, étoile dans ce faubourg, illuminant ma nuit mieux que l'astre du jour. Elle apparut soudain, grande, noble et fière. Son visage rayonnant baignait dans la lumière qui donnait aux choses la douceur du velours. Un éclair de ses yeux vint blesser ma paupière, allumant dans mon coeur une passion singulière. Et fit naître en moi ce désir que je ne peux défaire. quel sort m'as-tu jeté, princesse ou bien sorcière, pour que ma vie ne soit qu'espérance et prière pour toi, belle inconnue dont j'attend sans cesse l'amour ? »